Le relief de Caroline

Par Relief - le chemin de la santé mentale
te souviens-tu où tu étais et qu’est-ce que tu faisais un certain samedi soir du mois d’août lorsque tu étais âgé de 8 ans?
 

Il est fort probable que la réponse soit non. Mais moi, je me rappelle très bien l’endroit où je me trouvais, mais surtout, je sais que c’est à ce moment précis que tout a basculé. En quelques minutes, j’ai été foudroyé par une multitude de symptômes physiques et mentaux. J’étais assise au côté de ma mère dans un endroit public où se trouvait une foule de gens et j’assistais tout bonnement à un spectacle. D’un seul coup, j’ai senti mon corps tremblé, mon cœur battre la chamade, des sueurs froides qui perlaient sur mon front, le sol qui se dérobe sous mes pieds; la confusion dans ma tête; le goût de pleurer; l’envie de m’enfuir; la peur de mourir. Je ne sais pas ce qu’il m’arrive mais je supplie ma mère de sortir de cet endroit, à défaut de pouvoir m’échapper de mon propre corps. Rapidement, même si ça m’a paru une éternité, nous sommes à l’extérieur, je suis assise sur le sol, je suis inconsolable, je ne comprends pas ce qui se passe. Du point de vue d’une fillette, j’ai cru à un cas isolé mais j’étais loin de m’imaginer que je venais de vivre une première d’une longue série.

Après cet épisode, j’ai eu un répit de quelques mois. Puis un jour, je suis en classe, je suis en 5ème année du primaire, l’enseignante donne sa matière et tout d’un coup, je le sens, je vais mourir. Je regarde autour de moi, tout le monde est attentif et semble serein pendant que moi, je lutte pour survivre. Ça y est, je suis en train de sombrer dans la folie. Je me lève d’un bond, je me dirige tant bien que mal vers mon institutrice, j’implore celle-ci de me laisser sortir tout en essayant de cacher mes larmes pour ne pas alerter mes camarades mais en vain. Quelques minutes plus tard, je suis à l’extérieur, et je fais les cent pas devant l’établissement. Même si encore une fois, les symptômes ont disparu, étrangement, je ne voulais plus aller à l’école car j’avais peur de revivre la même chose. Déjà à ce jeune âge, je devais me battre avec moi-même à tous les matins pour m’obliger à prendre l’autobus scolaire. C’était un supplice au quotidien, je vivais avec la peur au ventre à tous les jours que le mal-être revienne.

À cette époque, les crises étaient plus espacées, mais je devais vivre malgré tout avec cette épée de Damoclès au-dessus de ma tête. J’ai eu de nouveaux épisodes à différents endroits : L’autobus; la voiture; les magasins; le cinéma; à la maison ect … Je ne pouvais pas me confier à qui que ce soit, tout le monde autour de moi semblait tellement normal et équilibré, je me disais que j’étais folle et que si j’en parlais, je serais enfermée à l’asile avec une camisole de force pour le reste de mes jours.

La première année de mon secondaire a été très difficile, j’étais terrifiée à l’idée de devoir gérer une nouvelle crise en pleine classe, donc, j’ai commencé à manquer l’école. J’étais toujours sous l’emprise de ces phénomènes inexplicables qui venaient me ravager sournoisement. J’étais incapable d’assister à mes cours, je me sentais prise au piège. Rien qu’à l’idée de m’asseoir dans une classe, la porte fermée et entourée de plusieurs élèves, j’étouffais. Ce sentiment m’habitait jour et nuit.

La débandade scolaire a commencé. J’avais beaucoup trop d’absence, ma mère me réprimandait, mes amis me jugeaient, mes enseignants me critiquaient etc. Du coup, j’ai tout abandonné, encore une fois.

L’année de mes 16 ans, j’avais des symptômes presqu’à tous les jours. J’ai réussi à terminer mon année scolaire de peine et de misère et à la fin de l’été, j’ai décidé de ne pas retourner en classe en septembre. J’avais en poche qu’un secondaire 3, mes parents n’étaient pas d’accord et ils ne comprenaient pas mon choix.

Pour réussir à faire passer la nouvelle, je disais que je voulais aller sur le marché du travail, pour faire un peu l’école de la vie afin de savoir ce que je voulais faire plus tard comme métier. C’étaient des mensonges, si j’étais incapable d’aller à l’école, il m’était impossible de travailler. J’ai subi le jugement des autres pendant des années parce que je restais à la maison sans rien faire. J’étais constamment interrogé par mes parents, mon amoureux, mes amis et je fuyais les questions. J’ai même cessé de voir « ma gang » d’amies, car j’avais honte. Je commençais un boulot, mais je ne gardais jamais un emploi longtemps puisque j’étais constamment en souffrance. Bien sûr, je refusais de dire la vérité à mes proches de peur d’être envoyé à l’hôpital psychiatrique. Lorsque je regardais les gens autour de moi, c’était toujours le même constat, tout le monde semblait heureux et normal.

pourquoi moi je n’allais pas bien? pourquoi moi j’étais si différente?
 

Chaque évènement loin de chez-moi était un calvaire. À tous les jours de ma vie, c’était un éternel combat avec moi-même. J’étais une jeune femme, j’avais des rêves, des besoins, des envies mais j’étais incapable de faire quoi que ce soit. Si j’avais le malheur d’essayer de sortir de ma zone de confort, j’allais au plus mal. Je faisais un pas en avant et mon état me ramenait 10 pas en arrière. Le regard des autres sur moi était tellement lourd. Je savais bien que je démontrais une fille sans but, sans ambition, sans avenir. Ce n’était pas attrayant pour les gens d’avoir une personne comme moi à leur côté. J’errais dans la vie et j’avais sans cesse cette peur au ventre et cette boule dans la gorge. Mon mal-être grandissait avec moi, plus je vieillissais, plus j’avais des symptômes qui apparaissaient. La sensation de vertige, engourdissement, la phobie de sombrer dans la folie, le souffle court, le visage rouge, des bouffées de chaleur, tremblements, la peur de mourir. Je devais composer avec toutes ces manifestations sans jamais en dire un mot.

est-ce que tu veux savoir comment j'ai fait pour me sentir mieux?


J'ai accepté la maladie et au fil du temps, j'ai garni mon coffre à outils à l'aide de thérapies; d'ateliers psycho-éducatifs, une médication adéquate, de l'activité physique, une alimentation saine, une bonne hygiène de vie, de la méditation et des techniques de respiration. Si moi je peux m'en sortir, toi aussi.

Est-ce que tu te reconnais? C'est ce qu'on appelle un TAG : "Anxiété Généralisé".

C'est important de pouvoir le nommer.

Maintenant, je le sais et si j'ai écrit un bout de mon histoire, c'est pour que tu te reconnaisses et que tu saches que tu n'es pas seul(e) et je t'encourage à aller chercher de l'aide.

Il existe des moyens pour que tu puisses aller mieux. Crois-moi, tu trouveras tes propres outils mais le plus important, c'est d'accepter.

Découvrez plus d'outils pour vivre avec l'anxiété

Relief souhaite remercier Caroline Michaud pour son témoignage.

Si vous aussi, vous souhaitez partager votre chemin en santé mentale,
écrivez-nous à communications@relief.ca.

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